Nos voisins belges n’excellent pas seulement dans le brassage de la bière ou la fabrication du chocolat, ils sont également les maîtres de la BD et le prouvent au Centre Belge de la Bande Dessinée à Bruxelles.


© CBBD

Nos voisins belges n’excellent pas seulement dans le brassage de la bière ou la fabrication du chocolat, ils sont également les maîtres de la BD et le prouvent au Centre Belge de la Bande Dessinée à Bruxelles.

A peine la grille d’entrée poussée, le hall baigné de lumière par une superbe verrière me transporte sur une agora où la brasserie, la librairie et la bibliothèque structurent l’espace public. La 2CV de Boule et Bill, et la fusée de Tintin sont telles deux colosses à l’entrée d’un majestueux escalier menant à ce qui semble être le temple de la BD. Les quatre niveaux de ce monde me tendaient alors les bras.

La première présentation de l’exposition permanente retrace l’histoire de la bande dessinée, des dessins rupestres aux ouvrages que l’on connait aujourd’hui. Comme toutes les autres, elle est traduite en français, en flamand, ainsi qu’en anglais. Trop étendu chronologiquement, ce préambule pourtant concis m’a paru peu indispensable pour aborder les salles à venir.

A la sortie de cette introduction, j’espérais un nouvel éclairage mais cette fois-ci braqué sur la fabrication d’une bande dessiné, mais rien de cela ne m’attendait. La salle suivante nommée « La Gallery », est basse de plafond, sombre telle une chambre noire où l’on aurait aligné des chevalets de verre. Le lieu regorge de planches originales, le Saint Graal de l’amateur. Chacune d’entre elles possède son propre cartel où figurent le nom de l’auteur de la série, son titre, et la date de réalisation. L’enchainement de plus d’une centaine de planches de style différent devient très vite lassant, aucun parcours ou discours n’est proposé aux visiteurs. Les dernières planches ne reçoivent alors qu’un simple regard passant.

A l’étage, sous les dômes de verres, « le Musée de l’imaginaire » présente, les principaux auteurs de la bande dessinée belge. Trois parcours muséographiques, d’époques et de formes différentes, invitent à découvrir ou redécouvrir les travaux de ces protagonistes du 9ème art qui ont œuvré pour son essor. Leur travail est retranscrit à travers leur biographie, et des imprimés de leurs séries, auxquels s’intègrent des textes descriptifs de leur style. L’univers des artistes les plus populaires est mis en scène grâce à des décors reconstitués, certes défraichis et un peu datés, mais qui contribuent néanmoins à faire voyager le visiteur dans la série phare de l’auteur.

Fiers de travailler dans un si bel édifice Art Nouveau, les responsables du CBBD n’ont pas hésité à intégrer au parcours muséographique, l’histoire et l’évolution du lieu. Cette présentation bien que succincte et instructive, est pourtant mal insérée dans le discours, l'on tombe dessus par hasard.

Dans cette exposition permanente, on peut principalement regretter le manque de diversité des supports. La lecture consécutive du travail de chaque auteur lasse rapidement. Malheureusement aucun objet, ou album original n’est présenté, il aurait pu casser la continuité des récits en apportant une vision nouvelle et complémentaire sur l’œuvre de l’auteur. Des tentatives de diversification, comme des maquettes mal réalisées, ou quelques vitrines de revues et d’objets publicitaires vieillissants, ne suffisent pas immerger le visiteur dans l’imaginaire du dessinateur.

© CBBD-Daniel Fouss

   

L’espace dédié aux expositions temporaires est plus restreint, il se situe sur une mezzanine surplombant l’exposition permanente. Au moment de ma visite deux créateurs étaient mis à l’honneur durant quatre mois et demi. C’est le cas de l’auteur britannique Posy Simmonds qui pour la première fois a vu son oeuvre retracée lors d’une exposition. Celle-ci présente de nombreux croquis et planches originales de l’artiste, illustrant ainsi le processus de création de ses histoires. La muséographie se raconte au fil du parcours grâce à différents supports numériques, comme la vidéo ou l’utilisation de borne tactile. Les panneaux explicatifs plus traditionnels, sont le point faible de cette présentation. Le discours est trop complexe, et surtout excessivement long.

A contrario, les écrits de la rétrospective de François Walthéry sont eux plus judicieux. Beaucoup moins denses, ils ne gardent que l’essentiel, ce qui éclaircit le discours. Le propos est illustré par de très beaux décors reconstitués, agrémentés d’extraits vidéo montrant l’artiste à l’ouvrage. La compréhension est simplifiée par la présence de nombreux croquis, planches originales et produits dérivés qui retracent la création de l’artiste. Ce qui fait la force de cette exposition, c’est l’aller-retour incessant entre la personnalité haute en couleur de l’auteur et celle de son héroïne, une hôtesse de l’air charmante et charmeuse qui vit des aventures extraordinaires aux quatre coins du globe. Natacha laisse d’ailleurs entrevoir ses atouts lorsque l’on pénètre dans une partie déconseillée aux enfants. 

Le dernier lieu d’exposition se situe à l’entresol. Cet « espace St Roch », que je pensais être le prolongement de « La Gallery », propose en réalité une sorte de petite exposition temporaire, qui retrace les étapes importantes de la vie d’Edgar P. Jacobs, le créateur de Blake et Mortimer. Cette biographie illustrée a été réalisée par Louis Alloing et Rodolphe qui ont retracé son existence en s’appropriant son style. Cette proposition est la plus novatrice du musée, l’originalité de sa forme aurait dû être davantage soulignée. La mettre à la fin du parcours ne la valorise pas, le visiteur rassasié, ne prend plus la peine de s’attarder sur le travail réalisé.

La visite s’achève, je descends retrouver la réalité, et ferme dernière moi les grilles d’un monde imaginaire, où la bande dessinée s’est dévoilée à travers son histoire et ses auteurs, pour que chacun puisse apprécier sa diversité.

Boris Boulanger