La Halle aux sucres est une institution atypique qui regroupe en son sein le Learning center villes durables, l’Agence d'urbanisme et de développement de la région Flandre-Dunkerque, le Centre de la mémoire urbaine d’agglomération ainsi que l’Institut national spécialisé d’études territoriales. Toutes ces organisations sont liées à l’urbanisme dans un lieu résolument mis sous le signe de l’architecture, dès son entrée pensée par Pierre-Louis Faloci. A l’origine, le bâtiment était une grande halle qui servait à transformer la betterave en sucre. Aujourd’hui il est évidé et coupé en deux. Ne restent dans la nouvelle construction que les murs extérieurs. Ce nouveau lieu très moderne métamorphosé illustre le lien passé-présent-futur qui est central pour la Halle aux sucres.

L’entrée du site © Daniel Osso

Elle est également porteuse d’un regard ouvert sur l’international : en effet l’exposition du Learning center esquisse les différentes manières d’appréhender l’urbanisation dans le monde. Elle insiste sur ce qui se fait actuellement et les répercussions que cela pourrait avoir pour demain. Elle évoque différentes problématiques actuelles comme le transport, l’eau ou l’environnement et questionne les manières de faire et les problèmes actuels en essayant de montrer que des solutions existent. 

Dunkerque est une ville parfaite pour porter ces enjeux, puisque la ville n’a eu de cesse de se renouveler au niveau urbain. On peut citer comme exemple magistral, l’opération dynamo de 1940, où la ville s’est elle-même inondée grâce à ses wateringues [1] pour résister aux assaillants nazis. Par ailleurs, un film de Christopher Nolan portera cette histoire sur grand écran cette année  [2]. Cette opération a profondément changé la ville et son urbanisation en quelques heures seulement, faisant de Dunkerque une ville mouvante.

Le terme anglo-saxon de Learning center est utilisé pour désigner la double fonction du lieu : centre de ressources avec quantité d’ouvrages sur l’urbanisation, espace de vie chaleureux et lieu d’apprentissage porté par l’exposition.

L’exposition pensée par la muséographe Agnès Levillain, de la société Sens de Visite, se tient sur trois étages et repose sur les problématiques sociales, environnementales et économiques que soulève l’urbanisme. Pour que le visiteur s’interroge elle le rend actif, mobilise tous les sens avec la possibilité de sentir et d’entendre les différents bruits de la ville.

Dispositif sonore sur les bruits de la ville © MélineSannicolo

Elle évoque par exemple les différentes manières de se déplacer en ville, en montrant divers exemples de transports et de couloirs routiers. Ainsi on apprend qu’au Brésil des routes sont réservées aux bus, coupées du reste de la circulation. On peut voir les grandes autoroutes américaines remplies de voitures ou le développement des cyclistes dans le nord de l’Europe. Bien plus, elle laisse une grande place au numérique et aux médias participatifs. Il est d’ailleurs dommage que ceux-ci soient sous-exploités, un manque de témoignages empêche de les rendre lisibles. En effet, les contenus dépendent des visiteurs et utilisateurs de l’application [3] du musée, or peu d’entre eux fournissent des vidéos et photos pour rendre les médias participatifs, en témoignant sur leur ressenti de la ville. 

Par exemple un dispositif interactif propose aux habitants de dessiner le chemin qu’ils font tous les jours dans la ville de Dunkerque sur l’application : aller à l’école ; s’arrêter pour prendre des croissants ; aller au boulot ; etc. Il montrerait les différentes manières de se déplacer dans la ville avec différents trajets proposés. Malheureusement ce dernier n’est pas actif, car peu d’habitants font leur « tracking » [4]. Cette absence de témoignages peut s’expliquer par le manque de visibilité de l’application dans la ville et par le côté anxiogène de la notion de « tracking ».

L’exposition se lit facilement avec des illustrations immenses et de la data vision. Enfin les exemples utilisés sont saisissants, entre dimension locale et internationale, insistant sur le fait que les enjeux d’urbanisme sont les enjeux de tous.

Un quatrième étage est destiné à l’exposition temporaire « Villes réelles, villes rêvées ». Son côté artisanal avec les cartels écrits à la main et la scénographie en carton, lui donne un certain charme et n’enlève rien à son propos scientifique sur les villes utopiques. Des jeux et des livres sont disséminés dans toute l’exposition incitant à y passer la journée.

Entrée de l’exposition temporaire © Annaëlle Lecry

La Halle aux sucres est donc un tiers lieu, c'est-à-dire un lieu hybride sur l’urbanisme, à la croisée du centre de documentation, du lieu de vie et de l’espace d’expositions qui s’implante parfaitement dans son territoire.


Océane De Souza

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http://testweb.halleauxsucres.com/: le site du musée

https://www.urbanisme.fr/: pour en savoir plus sur l’urbanisme 


[1] "Ensemble des travaux de dessèchement des pays situés au-dessous du niveau de la mer, dans le nord-ouest de la France, en Belgique et aux Pays-Bas." Dictionnaire Larousse

[2] http://www.allocine.fr/film/fichefilm_gen_cfilm=240850.html 

[3] http://itunes.apple.com/fr/app/la-halle-aux-sucres/id1063723812?l=en&mt=8 

[4] Suivre le chemin d’une personne pour analyser son comportement, notion de marketing à la base.