Les images de ce film de Spielberg me sont apparues comme une évidence lorsque j’ai pénétré dans l’espace qui abrite « Map for unthought thoughts », pièce maîtresse de l’exposition Contact d’Olafur Eliasson présentée jusqu’au 23 février 2014 à la fondation Louis Vuitton.


Map for unthought thoughts
, 2014 ⓒ SM

Les images de ce film de Spielberg me sont apparues comme une évidence lorsque j’ai pénétré dans l’espace qui abrite « Map for unthought thoughts », pièce maîtresse de l’exposition Contact d’Olafur Eliasson présentée jusqu’au 23 février 2014 à la fondation Louis Vuitton. Contact…, Contact est une affaire de contacts, mais qui contacte qui?C’est tout d’abord la fondation Vuitton qui contacte Olafur Eliasson pour la première exposition consacrée à un artiste contemporain au sein du bâtiment inauguré le 27 octobre dernier.

D’une surface de 11 000 m2, l’édifice comprend onze galeries dédiées à la présentation des collections permanentes, à la création et aux expositions temporaires. Il accueille également un auditorium et ses terrasses offrent une vue imprenable sur la capitale. Son architecture est le fruit d’un travail de recherche fortement imprégné par l’architecture de verre et de jardin de la fin du XIXe siècle. Quoi de plus naturel pour un édifice implanté à la frontière du bois de Boulogne et du jardin d’acclimatation.

Ce qui frappe particulièrement le visiteur, c’est l’assemblage de blocs recouverts de verre que l’architecte nomme « iceberg ». Mais quand j’observe le bâtiment dans sa longueur, il me fait plutôt penser à un insecte rampant en train de déployer ses nombreuses pattes pour avancer. C’est au niveau -1 que les installations de l’artiste danois rentrent en contact avec le vaisseau de Frank Gehry.

L’ensemble comprend trois grandes installations (« Map for unthought thoughts », « Contact » et « Inside the horizon ») entrecoupées de pièces de petites dimensions: « Touch », une météorite au nom incitateur, deux lentilles qui donnent à voir l’extérieur du bâtiment de l’intérieur, un geyser miniature nommé « Big bang » ou encore une sculpture vortex aux allures de corne d’abondance. Elles prennent place au sein d’un parcours au plan original, dominé par les formes circulaires et sinusoïdales.

L’alternance obscurité/lumière est un élément qui marque profondément l’exposition et que je garderais probablement longtemps en mémoire. Nous avançons dans l’obscurité sans savoir ce qui nous attend et régulièrement notre chemin croise celui de la lumière. Orangée, douce et apaisante, elle est matérialisée par une ligne filant le long d’un mur circulaire dans la salle qui abrite « Contact ». Blanche et agressive, elle nous éblouit lorsqu’elle éclaire périodiquement la fontaine du Big bang, tandis que le jaune crépusculaire rétro-éclairé des 43 piliers de « Inside the horizon » apporte bien-être et réconfort.


Contact,
2014 ⓒ SM

 

Nous ne sommes pas seuls dans cette quête de la lumière. À l’aide de leur lampe de poche, les agents de surveillance nous permettent de déambuler d’une salle à l’autre, nous guident et nous sécurisent. Je ne peux m’empêcher de penser qu’ils font eux-mêmes partis du dispositif. Que le temps de l’expérience, ils endossent le rôle de passeurs ; qu’ils sont « notre contact ».

Et puis il y a le miroir. Véritable leitmotiv, il est présent dans les trois grandes installations. Celui de « Map for unthought thoughts » donne l’illusion que nous nous trouvons dans une pièce circulaire alors qu’elle ne l’est qu’à moitié. Paradoxalement ce n’est pas sur notre reflet dans ce miroir que nous nous attardons mais sur notre ombre projetée sur le mur d’en face. Face à cette ombre légèrement tremblante et dans un rapport d’échelle complètement bouleversé, nous avons l’impression de faire une rencontre du 3ème type. Or, ce troisième type, ce n’est que nous. Nous face à nous-mêmes. Chacun examine alors son ombre, avance, recule, prend conscience de son corps, tente différentes postures et après avoir fait le tour de la question regarde autour de soi pour voir ce que fait l’autre et, souvent, reproduire ses gestes.


Rencontres du 3ème type, Steven Spielberg, 1977
ⓒ DR

 

Le miroir de « Contact » nous permet quant à lui de penser que la totalité de la pièce est encerclée d’une ligne lumineuse. Là, nous marchons sur un sol bombé comme à la surface du globe. Dans la semi-obscurité nous tentons de regarder notre reflet. Nous évoluons avec plus de retenue, probablement du fait de la lumière plus intimiste. Bizarrement c’est dans « Contact » que je perds un peu le contact.

Le parcours se termine dans le Grotto, une galerie extérieure dans laquelle Eliasson a installé une œuvre permanente commandée spécialement pour le bâtiment. « Inside the horizon » est faite de 43 piles triangulaires éclairées de l’intérieur, recouvertes de miroirs sur deux faces et de mosaïque jaune sur la troisième. Notre image y est démultipliée. En avançant entre les piliers, nous nous demandons pourquoi certains ne sont pas placés de la même manière que d’autres. Et avec un peu de chance, nous parvenons à trouver le point qui nous permet de nous admirer dans tous les miroirs en même temps.


Inside the horizon,
2014 ⓒ SM

 

Vous l’aurez compris, Contact est bien plus qu’une exposition (en est-ce une d’ailleurs?). Nous ne sommes pas là pour contempler l’œuvre d’Eliasson, nous sommes au cœur de l’oeuvre, nous faisons l’oeuvre. Nous avons affaire à une oeuvre immersive. La proposition de l’artiste nous amène à rentrer en contact avec nous-mêmes ainsi qu’avec les autres. Elle invite à s’interroger sur sa place au sein du groupe de visiteurs, et plus largement au sein de la société et même de l’Univers. L’Univers que la main d’Eliasson rend ici tangible. Sommes-nous si peu de choses comme on a coutume de le dire ?

Avec Contact, de manière subtile et sans violence, Olafur Eliasson nous offre l’opportunité d’être au contact et de prendre conscience de l’autre. Alors, saisissons cette opportunité.

 

Sabrina Masella

Olafur Eliasson : Contact

Jusqu’au 23 février à La Fondation Louis Vuitton

Application Your exhibition guide, 2014 conçue par l’artiste à télécharger gratuitement sur l’App Store ou Google Play

http://www.fondationlouisvuitton.fr/

http://www.olafureliasson.net/

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