Depuis une dizaine d’années, YouTube voit apparaître des youtubeurs spécialisés dans la vulgarisation scientifique, parmi lesquels Dr Nozman avec ses 4,16 millions d’abonnés et Max Bird avec ses 749 000 abonnés. Ce phénomène d’une grande ampleur ne laisse pas le monde de la culture indifférent. En novembre 2018, le ministère de la Culture publie un document recensant les « 350 chaînes YouTube culturelles et scientifiques francophones à découvrir et partager ». Une preuve d’un intérêt certain pour cette plateforme.
Image d'intro : ©M.T

Le YouTube des musées scientifiques

De nombreux musées scientifiques possèdent leur propre chaîne YouTube. Celle du Muséum National d’Histoire Naturelle de Paris ouvre en 2017 et compte aujourd’hui 17 800 abonnés. Y sont postés des rediffusions de conférences, des podcasts, des interviews ou de courtes vidéos en lien avec les expositions. C’est le même type de contenu pour la Cité des Sciences et de l’Industrie (créée en 2006 avec aujourd’hui 36 000 d’abonnés) ou le Musée des Confluences (créée en 2015 avec aujourd’hui 1 470 d’abonnés). Ces chaînes YouTube sont un lieu de stockage de vidéos institutionnelles qui sont souvent relayées sur d’autres réseaux sociaux comme Instagram, Twitter ou leur site internet.

Rares sont les musées qui publient des contenus spécifiques à la plateforme. YouTube a ses propres langages et codes, popularisés par les youtubeurs : une vidéo rythmée grâce au montage, de nombreuses références à la culture internet (des chansons, des memes, …) et une relation entre vidéastes et public qui se veut sincère et authentique, en somme, des codes qui tranchent avec des formats télévisuels.

Voici deux exemples de musées qui reprennent ces codes : le musée de Minéralogie de Mines ParisTech ouvre sa chaîne YouTube en 2016 et compte aujourd’hui 1 980 abonnés. La chaîne sert principalement de stockage mais une websérie sort du lot : « Histoire de Cailloux ». En 2017, la première vidéo sort : pendant 1 minute et 44 secondes, Didier Nectoux nous parle de la Sépiolite à travers des anecdotes. 82 épisodes passionnants, vus par 100 à plus de 1 000 personnes. Le second exemple est le Muséum d’Histoire Naturelle de Neuchâtel qui ouvre sa chaîne en 2016 et compte aujourd’hui 412 abonnés. La websérie « Collections Bestiales », créée en 2017, présente des naturalisations des collections du muséum. Ces vidéos correspondent parfaitement aux contenus spécifiques de YouTube, bien réalisées et très comiques (et je ne dis pas cela parce que j’y suis en stage !).

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Captures d’écran de la Websérie Histoire de Cailloux (à gauche) ©MINESParisTech et de Collections Bestiales (à droite) ©MHNN

Des collaborations avec des youtubeurs

Les collaborations de youtubeurs avec le Louvre sont sans doute les meilleurs exemples. En 2016, le Louvre décide de collaborer avec 3 youtubeurs, Nota Bene, Axolot et Le Fossoyeur de Films. Ces formats ayant particulièrement bien marchés, le Louvre continue avec 5 autres youtubeurs. Aujourd’hui, ce sont 19 youtubeurs français ou britanniques qui ont réalisé en tout 28 vidéos, certaines ont fait plus de 700 000 vues. Collaborer ainsi est pour les institutions l’occasion de toucher un jeune public, voire de désacraliser l’image des musées, des sciences et des arts. Pour les youtubeurs, cela permet de gagner en crédibilité auprès de leur audience. Ce système de collaboration est souvent unidirectionnel, c’est l’institution qui commande aux youtubeurs.

Concernant les musées scientifiques, peu d’exemple existe. En 2009, Universcience lance la chaîne YouTube « Le Blob, l’extra-média » avec aujourd’hui presque un million d’abonnés. « Infox ? Riposte ! » est une série créée en collaboration avec le youtubeur Thomas Gauthier de la chaîne du même nom. Le Youtubeur Léo Grasset, de la chaîne DirtyBiology a collaboré avec le Louvre et avec le musée des Confluences à Lyon pour promouvoir une de leur exposition.

Somme toute, peu de collaborations existent, pourquoi ? Est-ce par méconnaissance réciproque : les youtubeurs ne se sentiraient pas légitimes et n’oseraient pas aller vers les institutions culturelles. Et de l’autre, les musées manqueraient de budget ou manquent d’intérêt et les médiateurs des musées pourraient craindre de se faire remplacer.

Est-ce que ces collaborations amènent de nouveaux publics ? Nous avons peu de recul sur cette question, une raison de plus pour que les institutions ne s’y engagent pas. En effet, youtubeur est un métier à part entière, l’investissement d’un musée sur cette plateforme en vaut-il la peine ? Vue l’énorme concurrence sur YouTube, il est compliqué de percer sans de gros investissements financiers et humains comme le Louvre.

 

Pour résumer, les chaînes YouTube des musées scientifiques servent principalement de stockage de vidéos institutionnelles, mais certaines institutions cernent le concept de la plateforme et s’y essayent. D’autres institutions optent pour une autre méthode : la collaboration avec des youtubeurs-vulgarisateurs scientifiques.

Je terminerai par une sélection de vidéos à voir :

 

« Que diriez-vous d'un os dans le pénis ? - Collections Bestiales #1 » du muséum d’histoire naturelle de Neuchâtel ©MHNN

 

 

« La science des mythes (DirtyBiology et C'est une autre histoire) » de la collaboration entre le musée du Louvre et les youtubeurs DirtyBiology et C’est une autre histoire ©MuséeduLouvre

 

Enfin, la meilleure pour la fin, la youtubeuse Valentine Delattre de la chaîne Science de Comptoir qui vous fera enfin aimer la géologie. Je rêve de voir une de ses vidéos dans une exposition !

 

« Ivre, Elle Lèche Des Cailloux (Pour Une Bonne Raison) » ©SciencedeComptoir

Mélanie TERRIÈRE

Pour en savoir plus :

 

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