Faux musée, attrape touriste, fastfood de la culture, arnaque…  Bien des surnoms me viennent en tête après avoir visité le Musée des illusions, mais je ne le qualifierais surement pas de musée. 

Photo du parcours de visite ©A.S.

 

Un nom plus que discutable

Selon la nouvelle définition de l’ICOM parue en août 2022, “Un musée est une institution permanente, à but non lucratif et au service de la société, qui se consacre à la recherche, la collecte, la conservation, l’interprétation et l’exposition du patrimoine matériel et immatériel. Ouvert au public, accessible et inclusif, il encourage la diversité et la durabilité. Les musées opèrent et communiquent de manière éthique et professionnelle, avec la participation de diverses communautés. Ils offrent à leurs publics des expériences variées d’éducation, de divertissement, de réflexion et de partage de connaissances. » L’autoproclamé « Musée » des illusions imite la structure muséale dans sa forme : une billetterie, un parcours de visite, des cartels, une boutique… mais en vérité, il est bien loin d’un musée tel qu’il est défini aujourd’hui.  

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Photo du parcours de visite ©A.S.

 

Faisons la liste : 

- il n’y a pas de collection, il n’y a donc aucune mission de conservation ou valorisation.

- s’il donne à voir des illusions, les explications sont très limitées voire inexistantes donc le rôle éducatif est presque réduit à néant.

- ils (au pluriel) n’existent qu’à but lucratif !

 

De la définition du musée, ne reste que le divertissement. Nous pouvons alors nous demander : quelle différence avec une simple attraction touristique ? Aucune. Il existe uniquement pour des raisons lucratives. Et ce à travers le monde.  

 

Un champ de franchises fleurissant

Il s’agit en effet d’une franchise qui pollue le paysage culturel de nombreux pays et de nombreuses villes. Il suffit d’observer la liste sur leur site. 

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Capture d’écran du site du musée montrant toutes les localisations

 

Il en existe un dans toutes ces villes : 

Athènes, Belgrade, Bruxelles, Budapest, Busan, Le Caire (cairo), Dallas, Doha, Dubai, Hambourg, Istanboul Istiklal et Anatolia, Kansa City, Kuala Lumpur, Lyon, Maastricht, Madrid, Milan, New Delhi, New York, Orlando, Paris, Philadelphie, Riyadh, Seville, Shanghai, Stuttgart, Split, Taichung, Tbilisi, Tel Aviv, Thessaloniki, Toronto, Vienne, Zadar, Zagreb

 

S’ajoutent à la liste ces derniers qui sont en cours de création :

Atlanta, Austin, Boston, Charlotte, Chicago, Denver, Dublin, Dubrovnik, Houston, Las Vegas, London, Mall of America, Manchester, Marseille, Melbourne, Montréal, Nashville, Rome, San Diego, Scottsdale, Seattle, Sydney, Valence, Washington

 

Comment ça marche ? Pour la maudite somme de 40 000€ vous pourriez ouvrir un musée des illusions, avec un business plan tout prêt établi. Par la suite il suffit de reverser mensuellement 15% des recettes au propriétaire du concept. Les tarifs d’entrée compris entre 12 euros pour les enfants et 18 euros pour les adultes en font un investissement particulièrement rentable. 

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Photo du parcours de visite ©A.S.

 

Il suffit de trouver le lieu, même s’il n’est pas propice apparemment. C’est du moins le cas de la version parisienne qui se déroule sur deux étages particulièrement étroits. Les tranches horaires de visites sont en théorie instaurées pour garantir un confort de visite en limitant le nombre d’entrées selon la capacité d’accueil. Mais malgré cela, la circulation est compliquée. Il est presque impossible de suivre le parcours de visite tel qu’il a été pensé sans avoir l’impression de faire constamment la queue. Serait-ce une simple stratégie marketing pour créer la demande ?

 

Un contenu creux

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Photo de « cartels » ©A.S.

 

Le sujet de l’illusion semble pourtant aux yeux des muséographes être du pain béni puisqu’il est propice à l’implication physique du visiteur et de ses sens. Il permet d’aborder les lois de la physique, la logique d’espace ou encore les neurosciences et l’optique. Ici, toutes les « explications » ne font que décrire l’observable, restent à l’effleurement de la surface. 

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Photo d’expôt ©A.S.

 

Les effets d’illusions sont encadrés et accrochés comme des tableaux accompagnés de simples cartels écrits mais pauvres en contenu. À travers tout le parcours, seul un schéma permet d’aller un peu plus loin dans le contenu mais celui-ci est peu alléchant. Trop scientifique, trop complexe, trop long, les visiteurs passent sans le lire.  

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Photo des manipes ©A.S.

 

En guise de manip, trois petits casse-têtes sont laissés à disposition sur une table sans explication. L'utilité de ces derniers est-elle de faire comprendre un mécanisme, de transmettre une idée ou un contenu ? Non. Leur seule utilité est de donner envie de les acheter dans la boutique en sortant.

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Photo des manipes ©A.S.

 

Ce qui captive le plus le public dans ce lieu sont les espaces photo qui ponctuent la visite. A chaque fois, il est possible de se mettre en scène de façon différente et de se prendre en photo. Certaines mises en scène présentent un intérêt scientifique qui n’est nullement exploité (encore une fois) et d’autres ont pour seul but de faire une photo rigolote.

 

Le musée des illusions, s’il donne l’illusion d’un musée, n’en est véritablement pas un. Il n’en a ni les missions, ni les intentions. La critique principale exprimée ici concerne le flou créé par l’appellation « musée ». Ce mot évoque un ensemble de choses au visiteur qui ne sont pas applicables dans ce lieu. Et ce lieu, à défaut d’être le lieu de culture, comme il tente de le suggérer, est simplement un lieu de divertissement et de consommation.   

 

Aimé Sonveau

 

Pour en savoir plus :

 

#illusions #photo #arnaque